Le Musée d’Art Contemporain (MAC), comme savent la plupart des montréalais, est fermé et en travaux depuis l’été 2021. Évidemment, on peut quand même voir les expos du MAC à la Place Ville-Marie et on a entendu dire que contrairement aux rumeurs qu’on a entendues ces dernières années, le MAC continue à faire l’acquisition d’oeuvres contemporaines pendant son long sommeil architectural.
À partir d’aujourd’hui, on peut passer voir ces nouvelles acquisitions au Musée des Beaux-Arts de Montréal, où le MAC a investi un espace avec une exposition titrée Le confort et l’indifférence: acquisitions récentes du MAC.
Le confort, l’indifférence et un portrait disparate de la vie moderne québécoise
Les 37 oeuvres contemporaines présentées par le MAC pendant cette exposition, qui est installée dans un des espaces liminaux du Musée des Beaux-Arts, ont été produites par des artistes québécois ou vivant et travaillant au Québec -et acquises par le musée dans les 5 dernières années.
Stéphan La Roche, directeur du MAC, parle de l’expo comme d’un « tableau vivant du rôle des artistes dans notre société ».

Sans Titre 1 (de la série « Roxham »), 2017, tirage de 2024
Impression jet d’encre pigemntée, 1/3
101,6×152,4cm
Collection Musée d’art contemporain de Montréal
photo: avec l’aimable permission de l’artiste (c) Michel Huneault
L’exposition est titrée Le confort et l’indifférence d’après le documentaire culte de Denys Arcand tourné pendant et après le référendum de 1980 sur l’indépendance du Québec. Le film, sorti en 1981, est presque satirique dans son regard sur les divergences entre le patriotisme et l’attrait d’une vie douce.
Marc Lanctôt, le commissaire de cette exposition, fait un parallèle entre le film et l’attitude de la société québécoise face aux crises mondiales des dernières années. Pour introduire la collection d’oeuvres, il parle de « la difficulté à utilise (le privilège) pour favoriser le changement », de la complaisance apparente de la jeune génération par rapport aux enjeux mondiaux et surtout, de la place des artistes et de l’importance de leur regard sur leur propre société.
Si les thèmes de confort et d’indifférence peuvent largement être associés à chacune des oeuvres, c’est surtout avec énormément de plaisir qu’on découvre (ou redécouvre) le travail d’artistes québécois depuis 1975. Quand on parle des grands mouvements artistiques -politiques ou pas- dans l’histoire de l’art, il n’y a rien de plus obscur ou de plus excitant que l’art contemporain.
Quelques pièces un peu inconfortables pour le nouveau monde
Le confort et l’inconfort sont explorés de différentes façons par les oeuvres choisies par Marc Lanctôt.
Entre la domesticité bien organisée de la Carte Mentale de Valérie Blass, le visage collé au welcome mat de Chloe Wise et les sculptures de verre soufflé à travers des constructions restrictives de métal de Lorna Bauer, on ressent l’inconfort doux d’une société en doomscrolling constant que le commissaire critique gentiment avec une sélection qui nous gratte le visage.

One hit wonder horse town, 2022 (détail)
1 huile sur toile et 94 paillassons de jute
Dimensions variables
Achat, grâce à la générosité de la Fondation de la famille Claudine et Stephen Bronfman
Collection Musée d’art contemporain de Montréal
Photo: Paul Litherland, avec l’aimable permission de Blouin Division (image IN005: Morganne Boulden, avec l’aimable permission de Blouin Division) (c) Chloe Wise / ARS, NY / CARCC Ottawa 2025
On retrouve aussi un masque BDSM perlé de Dayna Danger, artiste autochtone (Two-Spirit, Indigiqueer, Métis-Saulteaux-Polish) qui parle de sexe, de consentement et de territoire et une photo de Michel Huneault en document témoin du passage de personnes en situation irrégulière à la frontière.
On a aussi adoré l’oeuvre de Jannick Deslauriers Sentences, Souffle et Linceul, une voiture en tissus dévorés par le feu sur la neige, assemblée par l’artiste comme un objet sécuritaire devenu incroyablement fragile.

Sentence, souffle et linceul, 2018
Tissu de fil d’aluminium, crinoline, soie, polyester et fil
165x610x244cm
Achat, grâce au Fonds Hamelys et au legs de madame Paule Poirier
Photo: Michael Patten, avec l’aimable permission de l’artiste
(c) Jannick Deslauriers
En tout et pour tout, c’est une exposition qui frise l’inconfortable mais avec l’aura rassurante de visions artistiques contemporaines qui semblent refléter un sentiment généralisé de divergences sociétales -entre confort moderne et chaos mondial.
Infos Pratiques
Où? au Musée des Beaux-Arts de Montréal, 1380 rue Sherbrooke Ouest
Quand? du 4 novembre 2025 au 3 mai 2026
Combien? 31$ pour les 26 ans et plus, 15,50$ les mercredis soirs, gratuit pour les 25 ans et moins, les membres des communautés autochtones et les personnes handicapées et leur accompagnateur